Critique de Apôtre Noir par Drystan
Publié le Mercredi 15 janvier 2014– Monsieur, nous nous faisons massacrer ! Ils ne veulent pas mourir ! Que l’Empereur nous protège ! Ils ne veulent tout simplement pas mourir ! Le capitaine Drokan du 23e régiment de Tanakreg jura et humidifia ses lèvres sèches avant de donner ses ordres dans le canal de commandement. Que pouvait-il faire ? Il devait bien y avoir un moyen de sauver quelque chose dans ce désastre. Mais qu’il soit damné si il en avait la moindre idée. Il se tourna vers son adjudant qui semblait complétement terrifié, le visage blême et les yeux figés.
- Val ! Des nouvelles du colonel ? Des nouvelles de n’importe lequel de ces foutus officiers ? L’adjudant blanc comme un linge secoua la tête, et Drokan jura à nouveau.
Avant de parler du roman lui-même je vais commencer par dresser un bref portrait de l’auteur. Anthony Reynolds est plus un développeur de jeux qu’un auteur. Il a participé à la rédaction de plusieurs codex et livres de règles. Apôtre Noir et plus généralement, la série Word Bearers est la seule implication d’Anthony au sein de la Black Library excepté une nouvelle dans le recueil Chroniques de l’Hérésie.
En prenant en compte le fait qu’Apôtre Noir est son premier roman, Anthony s’en sort avec les honneurs. Première bonne surprise, à l’époque de sa sortie (Bibliothèque Interdite 2010), les romans avec les space marines du Chaos en personnages principaux n’étaient pas nombreux, et pour seul Night Lord mettait également en avant une légion hérétique.
Apôtre Noir est un roman centré sur les Word Bearers, nous suivrons les terribles machinations de Jarulek, l’Apôtre Noir ainsi que son ost. Ces derniers sont attirés par la planète impériale de Tanakreg. Un sombre plan est à l’œuvre mais lequel ? Les forces de l’Impérium, en l’occurrence la garde impériale et le mechanicum tenteront de déjouer les plans de Jarulek et de ses dévots à n’importe quel prix.
La taille du roman est conséquente, 403 pages pourtant rares sont les moments de répit pour le lecteur. Batailles, terreur et angoisse sont le pain quotidien de cette histoire. Le scénario basique offre une myriade de possibilités à l’auteur qui s’y engouffre. Le scénario est entrecoupé entre les différents personnages principaux et factions présentes. Cela permet d’apporter de nombreux détails niveau fluff. Vous en apprendrez plus sur les paras élyséens, le Mechanicum, les démons du chaos et le fonctionnement d’une légion chaotique.
Chaotique, c’est le terme pour représenter l’ost de Jarulek, entre les différents hérétiques, les traîtres, les démons et les Space Marines, chacune de ces troupes ayant ses motivations propres. L’auteur en nous faisant découvrir la prise de Tanakreg depuis les yeux de différents officiers de Jarulek montre qu’un Space Marines du chaos ne se limite pas à tuer, brûler et piller.
McNeill avait esquissé ce genre de fonctionnement avec Déluge d’Acier et le personnage retors d’Honsou. Cependant, c’est Anthony Reynolds qui a ouvert la voie. Entre Marduk, le premier acolyte, Kol Badar, le premier capitaine, Bokkar le sergent des Terminators, et quelques autres, permettez moi de vous dire que nous avons une belle brochette d’enfoirés souhaitant prendre la place de Jarulek. Des personnages auxquels l’auteur insuffle une personnalité propre et des egos surdimensionnés. Le résultat est réussi, nous avons un ost surpuissant mais dans lequel l’ennemi est aussi bien intérieur avec de nombreuses dissensions et coups bas. Un tableau plus vrai que nature de ce que j’imaginais des Word Bearers.
Même si la répétition des scènes de guerre peut être lassante au fil de la lecture, Anthony s’est lâché. Outre des effectifs pléthoriques vous aurez droit à quelques apparitions impressionnantes, un ordinatus et un titan par exemple. Les troupes impériale auront aussi droit à un peu d’exposition. Assez pour nous montrer les difficultés qu’éprouvent garde impériale et Adeptus Mechanicus à travailler main dans la main. Vous assisterez également à l’asservissement d’un peuple et là fulgurante dégradation d’une planète aux mains du chaos. Pour ceux qui lisent la série des fantômes, ça vous rappellera Géréon. Cette partie est mitigée car l’auteur montre parfaitement la faiblesse ou la force du genre humain, qui se pliera aux souhaits de l’envahisseur ?
Qui conservera ses convictions jusqu’à la fin ?
Qui ira jusqu’à trahir ses amis pour survivre ?
Cependant en voulant faire dans l’horreur l’auteur tombe parfois dans le cliché.
La grande réussite du roman est de montrer ce que sont des Space Marines du chaos, des monstres sanguinaires prêts à tout pour parvenir à leurs fins, mais possédant des envies, egos, ils ne sont pas sans cervelles. De leurs côtés, les défenseurs de l’humanité feront preuves d’actes de bravoures mais auront en majorité une durée de vie limitées à 5 pages. La boucherie est perpétuelle dans ce roman. Si vous parvenez à vous identifier à un des personnages principaux Word Bearers, c’est que vous avez un sérieux problème mental, et c’est là une des forces de ce roman. Nous faire rentrer dans la psyché d’un méchant. Pas de morale, pas de regrets, à l’inverse des Night Lords qui peuvent parfois être « attachants« , Honsou aussi à la rigueur, ce n’est pas le cas pour les Word Bearers.
Enfin, bien que prévisible, le final n’est pas si décevant que ça et laisse la porte ouverte pour une suite. Je n’en dis pas plus pour vous laisser quelques surprises, bonne lecture !
Les plus
- Un roman centré sur des Space Marines du chaos.
- De la baston à grande échelle.
- Une psychologie élaborée et réaliste d’un Word bearers.
- Du fluff, Word Bearers, Mechinicum, élyséens.
- Des xenos en guest.
- Voir ce qu’il advient d’une planète impériale tombés sous le joug du chaos.
Les moins
- Les nombreuses coquilles et traduction hasardeuse.
- La tendance horreur/gore mal maîtrisée par moments.
- La durée de vie très limitée des personnages attachants.
- La suite de la trilogie non traduite à ce jour.
Un premier tome prometteur, une trilogie qui est bien lancée, dommage de ne pas avoir eu droit à la suite en français. Le style d’Anthony ne sera jamais celui d’Abnett mais il propose un roman explosif et sombre qui se dévore sans modération.