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Critique de Leman Russ : Le Loup Suprême par Maestitia

Publié le Dimanche 21 septembre 2025

« Non ! » cria-t-il, mais il était déjà trop tard.

Harraal chargea droit sur le jarl, griffes sorties, le visage tordu dans un masque de mort et folie.

Les bolters aboyèrent, les projectiles frappèrent les membres et arrachèrent des pans d’armure. La bête continua pourtant sa course, rugissant de douleur et de confusion, parvenant à ignorer les impacts alors que son corps était martelé encore et encore.

À aucun moment Jorin ne bougea. La créature-Haraal s’effondra à ses pieds, détruite par le mitraillage, le corps presque vidé de son sang. Jorin s’accroupit et prit le museau du monstre dans ses mains. Il respirait à peine, tout juste un léger souffle qui s’échappait en bouillonnant d’entre ses lèvres.

Jorin plongea le regard dans le sien, y cherchant quelque chose, n’importe quoi, un reste. Il n’y lut que de la douleur, une douleur animale, dénuée de toute intelligence et de conscience de soi. Jorin lâcha la tête et prit son propre bolter, dont il posa le canon sur le crâne de la bête.

« Pardonne-moi, » lui souffla-t-il, puis il appuya sur la détente. Le projectile explosa à l’impact, mettant un terme aux tourments de son frère.

Comme pour Bjell, ce fut une mort peu honorable. Un guerrier de l’Aett devait mourir comme un homme, debout, en luttant contre l’ennemi. S’il avait existé un moyen, Jorin aurait préféré lui offrir cette ultime grâce. La tête de la bête, qui n’était plus qu’une masse sanglante, retomba sur le pont, et elle cessa de respirer.

Deuxième tome de la série Primarchs, Le Loup Suprême met en lumière Leman Russ, père des Space Wolves, dans un récit qui croise tradition, héritage tragique et rivalité fraternelle. Contrairement au précédent, Chris Wraight livre ici une histoire courte mais dense, qui réussit à captiver dès les premières pages.

Une introduction qui plonge dans l’essence des Space Wolves

Le roman s’ouvre sur l’initiation d’une nouvelle recrue, une Griffe Sanglante, la première à rejoindre officiellement le Chapitre et non plus la Légion. Comme dans la Saga de Ragnar, cette séquence met en avant la brutalité et la singularité de l’intégration dans la VIe : l’épreuve du Canis Helix, véritable baptême de survie. Même en version condensée, ce passage est marquant et immerge immédiatement le lecteur dans la culture des Loups.

Lors de la célébration, cette jeune recrue se perd dans les méandres du b et tombe, par hasard ou par wyrd, sur Leman Russ lui-même. Le Primarque, fidèle aux traditions orales des Routs, entame alors le récit d’un épisode marquant de son passé : la fois où il fut vaincu par un autre que l’Empereur. Ce procédé narratif, rappelant la force des récits partagés dans Prospero Brûle de Dan Abnett, fonctionne à merveille. En quelques pages, Wraight capte l’attention et insuffle une curiosité immédiate : qui donc a pu battre le Loup Suprême ?

La plume de l’auteur, fluide et visuelle, donne vie à Asaheim et à son ambiance nordique, renforçant encore l’immersion. L’atmosphère, mélange de traditions orales et de paysages rudes, rend la lecture vivante et ancrée dans l’identité des Space Wolves.

La 13e Compagnie : une tragédie annoncée

Le récit nous transporte ensuite dans une époque antérieure à l’Hérésie d’Horus, au cœur de la campagne de Dulan. C’est là que la 13e Compagnie occupe le devant de la scène : ces guerriers adultes ayant survécu à l’implantation du Canis Helix, un exploit en soi. Mais cette survie a un prix terrible : certains succombent à la malédiction du gène, se transformant en bêtes sauvages, des Wulfens.

Les « modeleurs de chair », apothicaires de la VIe, se retrouvent impuissants face à ce phénomène. Ne trouvant ni explication ni remède, Jorin Bloodhowl choisit de cacher la vérité à son Primarque, abattant lui-même les frères qui sombrent dans la bestialité. Cette dissimulation dramatique ajoute une tension permanente à l’intrigue et prépare une révélation inévitable.

Pour les connaisseurs, l’écho est puissant : cette Compagnie deviendra plus tard la légendaire et maudite 13e, disparue lors du Sac de Prospero pour réapparaître seulement au 41e millénaire, lors de la 13e Croisade d’Abaddon. Contrairement à David Annandale, qui avait manqué l’occasion de traiter les Destroyers avec profondeur, Chris Wraight parvient à donner une véritable dignité narrative à ce drame génétique.

La campagne de Dulan : grandeur et rivalité

L’autre grand pan du roman est la campagne de Dulan. Cet ennemi humain mais farouche, soutenu par une technologie avancée et une volonté indomptable, oppose une résistance mémorable aux Space Wolves. Mais ce qui retient surtout l’attention, c’est l’arrivée de la Ière Légion, les Dark Angels, qui pose les bases d’une rivalité mythique.

Wraight excelle dans la mise en scène des différences entre les deux Légions : les Space Wolves frappent avec sauvagerie et instinct, tandis que les Dark Angels avancent méthodiquement, avec discipline et froideur. Les dialogues entre Russ et le Lion sont un régal, où se cristallisent leurs divergences : l’un est un sauvage flamboyant, l’autre un chevalier orgueilleux.

Un incident dramatique vient initier les tensions : un vaisseau dulannien est détruit par les Space Wolves, alors que des Dark Angels s’y trouvaient encore. L’équilibre fragile bascule. Cependant le Lion promet à Russ de lui laisser l’honneur d’abattre le Roi de Dulan. C’était sans compter la caputre d’un membre de la 13ème Cie un peu plus tôt dans le roman. Désobéissant aux ordres du Russ, Jordin fait un détour pour libérer l’Astartes devenu frénétique, transformé en Wulfen. Leman Russ se rend compte que quelque chose ne va pas avec sont Capitaine et décide de retarder l’assaut final pour retrouver Jordin.

Ce passage est puissant et la révélation de la malédiction fait l’effet d’une douche froide pour le Primarque lorsqu’il prend consicence, non seulement du secret dont a fait preuve Jordin, mais aussi de la malédiction qui pèse sur ses fils.

Pour ajouter un peu plus de drama, les autorités Dulanienne décide de propager sur tous les canaux une vidéo exposant le wulfen en cage accompagné d’un message de propagande dénonçant l’envahisseur comme un mutant monstrueux qui ne mérite aucune pitié. Cette exposition humiliante est vue de tous, y compris le Lion et sa Légion.

Mais ce dernier ne peut plus se permettre d’attendre et décide de mettre un terme au roi en brisant sa parole.
Lorsque Russ atteint le cadavre du Roi, les deux frères se chauffent et se mettent sur la gueule. On en attendait pas moins.

Le duel fraternel

La confrontation entre Russ et le Lion était inévitable. Elle est décrite avec intensité : une lutte titanesque où chacun incarne sa nature profonde. Leurs coups portent autant de rage que de frustration. La tension culmine lorsque Russ éclate de rire face à l’absurdité de leur querelle, juste avant de se faire assommer par un direct du Lion.

Cette fin, à la fois épique et ironique, ancre définitivement l’origine de la rivalité entre les deux Légions. Une rivalité ritualisée, plus antagoniste que haineuse, qui traversera les millénaires. Les Dark Angels, quant à eux, gardent pour eux le secret des Wulfens, fidèles à leur réputation de dissimulateurs.

Les plus

  • Présence constante et marquante de Leman Russ.
  • Une ambiance fidèle et authentique des Space Wolves.
  • Bon traitement de la 13e Compagnie et de la malédiction du Wulfen.
  • Campagne de Dulan immersive, riche en action et en lore.
  • Rivalité fondatrice entre le Lion et le Loup bien mise en scène.
  • Dialogues crédibles et percutants entre Primarques.
  • Combats spectaculaires, narrés avec intensité.

Les moins

  • Format court qui limite le développement de certains aspects (la société dulannienne notamment).
  • Rencontre initiale entre la recrue et Russ un peu trop commode.
  • Certains personnages secondaires manquent d’épaisseur.
5/5

Le Loup Suprême est exactement ce qu’on attend d’un roman de la série Primarchs : un Primarque central, une intrigue dense en lore, une ambiance fidèle et des relations fraternelles complexes. Chris Wraight réussit à livrer une histoire mémorable, aussi immersive que spectaculaire. Pour moi, c’est un sans-faute : 5/5.