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Critique de Magnus le Rouge : Maître de Prospero par Maestitia

Publié le Dimanche 28 septembre 2025

Magnus fit un geste vers les plates-formes antigrav chargées d’artefacts.

« Nous avons mis à jour des archives scellées et trouvé des documents pré-datant la Grande Croisade de plusieurs siècles. N’importe lequel de ces éléments pourrait être la clé pour découvrir pourquoi ce monde seul, à l’inverse de tous les autres de ce système, a survécu au cataclysme qu’à libéré la Longue Nuit.

— Pourquoi ce savoir est-il important pour toi ?

— Il pourrait être important pour nous tous, » avança Magnus.

— Nous avons des préoccupations immédiates bien plus pressantes. »

Magnus feignit une grimace de supériorité.

— Il me semble me souvenir que c’est toi qui m’a presque supplié de rester une heure de plus à Bœotia pour essayer de trouver la Bibliothèque de Kadmus, avant que l’enfer de prométhium ne mette le feu à la montagne. »

Perturabo sourit en se remémorant cet épisode.

— Et nous ne l’avons finalement pas trouvée, hein ?

— Non, et il ne se passe pas un jour sans que je regrette de ne pas t’avoir accordé cette heure de plus.

— Inutile de regretter quoi que ce soit sur ce sujet. Le mont Cithæron s’est embrasé de ses contreforts à son sommet dix minutes à peine après notre départ. Si nous étions restés, nous ne serions plus là pour en parler.

— Mais nous serions morts en pleine lumière, » fit remarquer Magnus.

Perturbo lui montra le ciel encombré d’appareils volants.

— Nous ne sommes pas là pour sauver des connaissances, mais des vies.

— Les deux sont vitales pour le futur, » dit Magnus.

— Ah, il y a de la vérité dans ces mots, » admit Perturabo. « Mais je me demande auquel de ces deux éléments tu donnes le plus de valeur. »

Le monde de Morningstar est au bord de l’apocalypse : rien ne pourra empêcher la mort de centaines de milliers de personnes. La seule lueur d’espoir réside dans l’alliance improbable de deux Légions aux philosophies radicalement opposées : les Thousand Sons et les Iron Warriors. Duo inattendu, diront certains… mais c’est ignorer la véritable nature de la IVe Légion.

Le génie logistique et martial de Perturabo, combiné aux pouvoirs psychiques colossaux de Magnus, laisse entrevoir la possibilité d’un miracle. Mais la question demeure : deux demi-dieux peuvent-ils réellement empêcher une apocalypse ? La réponse est nuancée, et c’est précisément ce qui rend le récit fascinant.

On retrouve Graham McNeill aux commandes et, comme souvent, il reste fidèle à ses habitudes d’écriture. L’auteur connaît son sujet et décrit les Thousand Sons avec assurance, mais je regrette profondément qu’un autre écrivain n’ait pas eu la chance de s’attaquer à Magnus. McNeill s’est approprié cette Légion au fil des années, et ce monopole finit par étouffer le regard que nous pouvons porter sur le Primarque et ses fils. John French, avec sa saga d’Ahriman, a prouvé qu’il était capable d’offrir une approche subtile et originale. Je ne peux m’empêcher de penser que son écriture aurait donné une dimension nouvelle à Magnus.

Là où McNeill brille encore, c’est dans son traitement des Iron Warriors. Depuis le mémorable Déluge d’acier, il a réussi à transformer une Légion souvent considérée comme monolithique en un véritable vivier de personnages nuancés. Perturabo en ressort grandi : loin de l’archétype froid et calculateur, il apparaît ici plus humain que jamais, réfléchi, doté d’une intelligence vive et d’une capacité étonnante à créer du lien. Cette humanité transparaît aussi chez ses capitaines. Forrix et Falk, loin des stéréotypes de brutes sans âme, surprennent par leur sens de la morale et la finesse de leur raisonnement.

Magnus, en revanche, ne bénéficie pas du même traitement. Bien que l’écriture reste fluide, il demeure enfermé dans son éternel orgueil, une caractéristique déjà surexploitée par McNeill et qui finit par lasser. Là où Perturabo se dévoile comme une figure complexe et touchante, Magnus reste campé dans sa superbe, presque figé dans ses propres travers.

Cela ne veut pas dire que les Thousand Sons sont négligés. Ahriman, Phosis, Atharva et plusieurs autres guerriers ont chacun droit à leur moment, et cette mise en valeur contribue à étoffer la Légion au-delà de son Primarque. Ces développements donnent de la densité au récit et évitent qu’il ne repose uniquement sur les épaules des deux demi-dieux.

L’histoire elle-même est soutenue par un dramatis personae riche et dynamique. Morningstar est décrite comme une planète ancienne, colonisée durant l’Ère des Luttes, où s’est implantée une secte perverse : les Dragons Rouges. Ces fanatiques vouent un culte à Shai’tan et se lancent dans une croisade sanglante contre les habitants. L’un des points marquants du récit est que certains civils refusent même d’être évacués, ajoutant une dimension philosophique au drame. Car au-delà de l’action, le cœur du livre pose cette question : pourquoi sauver ceux qui refusent d’être sauvés ?

L’action, rassurez-vous, est bien présente. Les batailles décrites par McNeill sont spectaculaires, cinématographiques même, dignes d’un film à gros budget. Mais malgré ces séquences épiques, le roman trébuche sur un écueil : l’entrelacement des trames narratives. McNeill semble vouloir brouiller les cartes et introduire des mystères, mais Reformulé : cette complexité artificielle finit par rendre la lecture inutilement confuse. Par moments, j’ai eu l’impression de perdre le fil non pas à cause de la richesse du récit, mais d’une volonté délibérée de compliquer les choses.

Pour autant, Le Maître de Prospero reste un roman solide. On y découvre une relation fraternelle entre Magnus et Perturabo qui, même si elle reste déséquilibrée, enrichit la compréhension de leurs personnalités. Le contexte apocalyptique de Morningstar donne une intensité dramatique bienvenue et, au-delà des défauts structurels, l’ouvrage offre des scènes et des réflexions qui marqueront les lecteurs.

Les plus

  • Les Thousand Sons bien représentés, avec Ahriman, Phosis et Atharva ayant chacun leur importance.
  • Un questionnement philosophique fort : pourquoi sauver ceux qui refusent de l’être ?
  • Perturabo magnifiquement écrit, à la fois humain, intelligent et surprenant.
  • Les Iron Warriors en pleine lumière, avec des personnages nuancés comme Forrix et Falk.
  • Des scènes épiques dignes d’un film, qui donnent un souffle héroïque à l’intrigue.

Les moins

  • Magnus figé dans son orgueil, ce qui appauvrit le personnage.
  • Une impression de monopole de McNeill sur les Thousand Sons, qui limite la diversité des points de vue.
  • Un récit inutilement complexe, qui embrouille la lecture sans réel bénéfice.
  • Des trames entremêlées qui nuisent parfois à la fluidité de l’histoire.
4/5

Un roman qui sublime Perturabo et ses fils tout en livrant un spectacle héroïque de haute intensité. McNeill reste un auteur solide, mais sa vision trop répétitive de Magnus finit par peser. Un livre marquant par son souffle apocalyptique et la profondeur donnée à la IVe Légion, mais qui laisse un goût d’inachevé du côté du Maître de Prospero.