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Critique de Le Roi Écarlate par Maestitia

Publié le Vendredi 16 juin 2023 | 3 révisions avant publication | 6 corrections après publication

+ Trouve-moi. Régénère-moi. +

Russ abattit Magnus sur son genou.

Quand Ahriman avait vu Magnus mourir pour la première fois, l’horreur avait été miséricordieusement discrète, à peine entrevue, et la douleur profonde mais brève.

Pas cette fois.

Le dos de Magnus ploya au-delà de ce que même un Primarque pouvait endurer. Ahriman vit, plus qu’il n’entendit, se rompre le dos de son père, et il n’y avait plus aucune souplesse naturelle dans ces deux moitiés de corps pliées l’une contre l’autre.

Même s’il savait que ce n’était pas véritablement son sire génétique, il hurla de chagrin et de colère. Le corps du Roi Écarlate se brisa comme une statue inestimable abattue par des sauvages. Une lumière aveuglante s’échappa de sa dépouille meurtrie.

Le cœur même de Magnus fut mis à nu, un entrelacs cristallin à la disposition géométrique, invraisemblablement complexe, des kaléidoscopes composés d’yeux en rotation, des spirales de pouvoir si densément imbriquées qu’elles en étaient indivisibles.

En cet instant eurent lieu à la fois la mort et l’apothéose de Magnus.

Son âme se brisa en éclats de verre tourbillonnants. Ahriman entendit le Roi des Loups glapir en voyant sa proie lui échapper, inconscient de lui avoir infligé le coup fatal.

L’esprit d’Ahriman suivit la dispersion des milliers de bris à partir de leur centre de gravité spirituel. En vertu de la vérité alchimique voulant que les semblables s’attirent, la grande majorité demeura assujettie à la volonté du Roi Écarlate, et fut reforgée au sommet de la Tour d’Obsidienne.

Mais cinq bris se perdirent loin de leur source.

Ahriman les regarda s’éloigner de la forme brisée de Magnus, emportés au-delà de Prospero par un noir dessein. Il les suivit jusqu’à ce qu’ils s’évanouissent dans les vagues du Grand Océan, en retenant les impressions fugaces qu’ils laissèrent dans son esprit.

La bibliothèque oubliée d’un roi errant, aux rayonnages grinçant sous le poids de dix mille tomes répertoriés dans la Phoinikôn Grammata.

Une geôle inhumaine, froide, et hostile comme l’éther. Un lieu inconnu de lui, mais plein de douleur et de culpabilité. Et d’une haine singulière.

Un dieu parmi les montagnes, affamé d’âmes et jadis gardé par des anges titanesques.

Un lieu de jugement et de trahison.

Et pour finir, un monde radieux au cœur de tout, jadis investi d’un but auguste, et à présent flétri par la mort de son rêve.

Tome 12 Un Millier de Fils ; Tome 15 Prospéro Brûle ; Tome 44 Le Roi Écarlate. Il aura fallu presque 30 tomes pour retrouver les Thousand Sons et leur père ô combien singulier, Magnus le Rouge.

C’est donc avec un plaisir non dissimulé que j’entamais la lecture de ce roman. En effet, les dernières apparitions du Primarque de la XVème Légion dans la saga sont de l’ordre de la parenthèse. On pense bien sûr à l’éruption du fantôme du Primarque sur une Prospéro dévastée après le sac par les loups.

Jaghatai Khan des White Scars atterrit sur la planète afin de questionner son frère qu’il considère comme le plus sage et le plus érudit en ce qui concerne le warp et ses pouvoirs. Un dialogue crucial où Magnus mettra le Khan devant un choix décisif qui sera celui de suivre Horus dans sa rébellion, frère qu’il respecte et admire au plus haut point, ou bien de rester fidèle à l’Empereur, qu’il qualifie lui-même de tyran.

Mais revenons à nos sorciers, car c’est bel et bien de cela dont il est question lorsque l’on aborde la Légion de Magnus. C’est la seule qui possède un lien aussi fort avec le warp. Alors oui, encore une fois, il existe d’autres Légions qui connaissent des affinités avec l’immaterium, mais aucune dont l’intensité peut rivaliser avec celle des Thousand Sons.

Nous commençons le roman avec une séquence des plus captivantes. Les deux premiers chapitres mêlent habilement descriptions Tzeetchiennes (pas facile à prononcer hein, va falloir s’y faire) et scènes d’action immersives. Les Thousand Sons ne combattent pas comme les autres.

C’est à coup de bolts psychiques, lévitation et autres boucliers kinétiques que les fils de Magnus luttent sur le Torquetum, un monde à la frontière du réel. Sur ce territoire nébuleux, l’oracle-démon Aforgomon attend Ahriman et son escouade.

Quelques mots sur l’escouade en question car celle-ci sera présente tout au long de l’ouvrage. On retrouve Ahzek Ahriman, premier capitaine, maître archiviste et meneur du Culte Corvidae dont la spécialité est de prévoir l’avenir. Difficile de rester humble avec un tel palmarès, mais j’y reviendrai plus tard. Il est accompagné d’Hathor Maat, Sobek, Menkaura, Sanakht, Tolbek, et Lucius des Emperor’s Children.

Mais qu’est-ce que vient faire Lucius ici me direz-vous ?! Et bien, vous le sauriez si vous aviez lu la critique de l’audio drama Lucius : The Eternal Blade. Effectivement, suite à sa cuisante défaite (c’est le moins que l’on puisse dire) sur Lydris, l’épéiste mégalomane a rejoint la XVème Légion pour se mesurer une nouvelle fois à Sanakht, le bretteur Corvidae.

La présence de Lucius est une bonne chose, car son orgueil démesuré ne sera pas tant grotesque comparé aux egos surdimensionnés de celui d’Ahriman, Hathor Maat ou encore Magnus. Le fils de Fulgrim sera le sardonique de la bande et bien que son humour soit noir, il offrira quelques rictus gênants au lectorat là où le sérieux des sorciers sera une constante immuable.

La première partie du roman nous détaille la fracture extraordinaire causée par Leman Russ à son frère Magnus. Ce dernier n’a pas simplement eu l’échine brisée, mais son âme s’est fragmentée! Cinq éclats ont été éparpillées dans le cosmos et depuis le Primarque Cyclopéen se meurt. Coincé sur la Planète des Sorciers, Magnus n’est plus que l’ombre de lui-même et s’obstine aveuglément à récolter toutes les connaissances de façon maladive.

Sur ce monde entre songe et réalité, la parodie absurde et bizarre de Prospéro est brillamment décrite au lecteur. On assimile facilement l’irréalisme de l’endroit que ce soit au niveau visuel, comme auditif. Graham McNeill nous plonge avec aisance dans ce territoire qui sera désormais le foyer en perpétuel changement de la XVème Légion.

Sachant cela, le premier capitaine Ahzek Ahriman est mandaté de retrouver et rapporter les éclats perdus de son père pour le régénérer. C’est ainsi que l’intrigue principale est lancée.

Le roman se lit bien et vite, d’autant plus vite si vous êtes une personne qui tient Magnus en son cœur. En lisant Le Roi Écarlate, on ne peut s’empêcher de ressentir de la compassion et de la pitié pour les membres de la Légion. Un peu comme les Word Bearers, les Night Lords ou encore les Iron Warriors qui ont été pour moi des Légions brisées bien avant leurs affiliations au Chaos.

La maladie de la chair dont sont victimes les Thousand Sons est terrible, implacable et malgré tout, Ahriman fera l’impossible pour tenter de sauver ses frères, qui se transformeront tôt ou tard en monstres difformes et ce, même lorsque Magnus, le plus puissant des Primarques éthérés, lui interdit toutes tentatives, car futiles.

Un passage mémorable où, pour retrouver un éclat, les fils de Magnus devront payer une dette de chagrin à un démon pour retourner dans le passé. C’est un exemple qui illustre le pathos qui accompagne la XVème Légion. Cette tristesse n’est pas omniprésente, mais elle suit chaque personnage comme une émotion inextricable et on apprécie cela.

En face de l’escouade d’Ahriman se présentera la troupe hétéroclite de Yasu Nagasena, dernier des descendants de l’Ancien Ordre Guerrier Terran. Nagasena est au service du Sigillite Malcador afin de trouver avant les Thousand Sons, les fameux éclats de Magnus et empêcher sa résurrection.

Pour ce faire, il sera accompagné de Bodvar Bjarki, prêtre des runes ainsi que de quatre autres Space Wolves, mais aussi de Dio Promus, archiviste et ancien Ultramarine qui a renoncé à ses vœux pour rejoindre les Chevaliers Errants du Sigillite. Durant leur quête, ils seront menés à rencontrer Lemuel Gaumon et Camille Shivani. Ces noms vous semblent familiers ? Quelques peu perdus peut-être, ce sont les commémorateurs présents dans le roman Un Millier de Fils du même auteur. Ces derniers ont été emprisonnés sur Kamiti Sona, une station-ville dédiée à l’incarcération de psykers.

Ces personnages loyalistes sont très intéressants, car riches. J’aurais pu aussi énoncer la cartomancienne et son garde du corps orgryn, mais je vous laisse les découvrir. Mon point est que le concept d’une troupe atypique fait encore des miracles selon moi. D’aucuns diront qu’elle est inutile et sert uniquement à donner le change aux sorciers. Je ne suis pas d’accord. Nagasena possède une personnalité forte et combinée à celle de l’Utramarine Promus, les deux forment un tandem attachant à suivre. Ajoutez les Space Wolves et vous obtenez de très bons dialogues qui mêlent humour, paradoxe et tragédie.

Vous l’aurez compris, la course aux éclats de Magnus est ouverte ! Les premiers qui les retrouvont auront gagné, mais le roman ne se résume pas uniquement à cela. Par conséquent, attendez-vous à des surprises, des retournements de situation et surtout à de la lutte. La lutte pour retrouver les éclats et sauver un père, la lutte de guérir ses frères d’une mutation irréversible, la lutte de retrouver sa mémoire perdue, la lutte pour vaincre un Primarque.

Les plus

  • De très belles scènes d'action.
  • L'équipe hétéroclyte de Malcador.
  • Une nouvelle histoire au cœur de la XVème Légion.
  • Ahriman qui porte le roman du début jusqu'à la fin.
  • Le style de l'auteur qui se lit bien malgré des redondances dans les descriptions.

Les moins

  • Le Primarque toujours incapable d'apprendre de ses erreurs.
4/5

Le Roi Écarlate nous offre une vision brisée du Primarque luttant pour regagner la mémoire pendant que les Thousand Sons, portés par un Ahriman superbement dépeint, tente de retrouver les fragments de leur Père. La lutte est omniprésente dans ce roman qui est indispensable pour comprendre la XVème Légion.