Critique de Cybernetica par Priad
Publié le Samedi 16 juillet 2016 | 5 révisions avant publication | 3 corrections après publication— Les Fists protègeront l’Empereur, dit l’Iron Warrior.
Avec la rivalité historique existant entre les deux légions, le Carrion se dit que ceci n’avait pas dû être une vérité aisée à admettre. Beaucoup d’Iron Warriors, dont Aulus Scaramanca, pensaient que l’honneur de joindre l’Empereur sur Terra afin de fortifier la capitale du glorieux Imperium, aurait dû revenir à la IVème légion.
— Et que va-t-il advenir de nous, demanda le Carrion ?
Devant eux, les puissants barillets de l’énorme gatling commencèrent à grincer se mettant en position de faire feu selon leur protocole d’attaque.
— Comme le Mechanicum, Aulus Scaramanca lui répondit, la IV légion vit en harmonie avec la chair et le fer. Nous étions faits pour cela. Nous sommes la force de ce territoire. La pierre qui protège. Le minerai ayant de la valeur. Au-delà du champ de bataille d’Olympe taché de sang et de rouille, je n’imagine pas de meilleur endroit pour un Iron Warrior d’y laisser ses os, que le sol écarlate de la puissante Mars.
Alors que le tonnerre tonitruant des servomoteurs et des mécanismes de l’édifice se mettaient en branle, l’Iron Warrior tourna son dos à Tantus Abolitorus, de sorte qu’il faisait maintenant face au Raven Guard. Il s’approcha avant d’ajouter:
— Alors que les fils de Corvus Corax, cependant, ont été forgés pour voler…
Avec ces dernières paroles faisant écho à la brise martienne, l’Iron Warrior saisi le Carrion par le bras, tel un satellite rattaché à sa planète, avant de l’envoyer au-delà du bord de la plateforme d’atterrissage.
Alors que le Carrion chutait dans cet air de faible densité, il vit l’Iron Warrior le regardait tomber.
Cybernetica est une novella appartenant à la série de l’Hérésie d’Horus et publiée en Juillet 2015. Annoncée initialement plusieurs années avant cela, la novella a connu une publication un brin chaotique, la Black Library annonçant cette dernière durant un de ses évènements avant de cesser toute communication la concernant. Difficile de vraiment savoir ce qui a pu se passer mais une chose est certaine, nous ne l’attendions plus et la hype était redescendu lors de sa véritable sortie. C’est donc un an plus tard que votre serviteur se voit en faire la critique et la question que nous avons tous à nos lèvres est, cela valait-il le coup d’attendre ?
L’hérésie se répand sur Mars et alors que la planète rouge voit son allégeance changer au fil des heures, les Space Marines à sa surface se battent pour leur survie. Nous accompagnerons le Carrion (traduire «La Charogne»), un Tech-Marine de la Raven Guard, durant les quelque 170 pages de ce récit. Alors que le lecteur fera un bond chronologique en arrière dans la timeline de l’Hérésie d’Horus, il sera tout de même appréciable de revivre cette brutale rupture au sein du culte de Mars à travers les yeux d’un Tech-Marine loyaliste.
Rob Sanders est un de ces auteurs discrets dont on entend peu parler mais qui pourtant bien souvent ravit la communauté de ses récits toujours très détaillés. Certains le connaîtront comme l’auteur de La Légion des Damnées, d’autres pour son diptyque sur Archaon (Warhammer). Dans ses œuvres, il n’hésite pas à s’investir en décrivant les lieux et faire fourmiller de détails le paysage qui se peint sous nos yeux. Tout comme des auteurs tel que Lovecraft, Rob se plaît à raconter des histoires simples en de longues pages descriptives, ajoutant une couche non nécessaire à la compréhension de l’œuvre mais néanmoins diablement pertinente pour nous faire comprendre l’ampleur des évènements qui ont lieu sous nos yeux. Bien évidemment la comparaison s’arrêtera là, mais ayant lu Les Montagnes Hallucinées de Lovecraft en parallèle de Cybernetica, j’ai su mieux apprécier ce que Rob cherchait à mettre en place : une histoire dans lequel l’ambiance a autant de poids sinon plus que la storyline elle-même.
C’est donc avec un sacré travail de description que Rob donnera vie au schisme de Mars, cette scission entre le Mechanicum que nous connaissions et celui dit «Noir» s’insurgeant au nom d’Horus. A l’inverse de mon inextinguible attrait pour les robots dans la science fiction, les récits sur le Mechanicum n’ont bien souvent eu que peu d’intérêt à mes yeux. Il faut dire que les dilemmes éthiques ne font pas partie de l’univers de Warhammer 40K et c’est donc avec cette idée de ne trouver là qu’une simple histoire de Space Marine s’opposant à la froideur calculatrice de la machine que je démarrais la lecture de Cybernetica.
Pourtant dès les premières pages je me retrouvais scotché à un univers plus dark et dramatique que ce dont Graham McNeill m’avait habitué avec son roman Mechanicum. Notre héros Raven Guard est en danger constant et l’on ressent cette tension dans l’air de ne pas savoir comment la situation à la surface de Mars va évoluer. Entre révolution et incompréhension c’est la survie qui prévaudra. Rob Sanders a carte blanche pour nous décrire les horreurs du 30ème millénaire et il ne va pas s’en priver avec de superbes monstruosités mécaniques. La première partie d’une cinquantaine de pages se dévorera d’une traite alors que le Carrion tentera d’échapper à cette planète devenue folle. Mais c’est néanmoins avec l’interlude suivante que l’auteur surprendra, un chapitre prenant place sur Terra et mettant en scène Malcador le Sigillite, Rogal Dorn, et le Carrion notre héros fraîchement sauvé.
La première partie n’était qu’une introduction dans le feu, le sang et les huiles, et cet interlude dans le calme d’un Terra encore indemne fera un joli contraste. Les dialogues très dynamiques nous mèneront à la problématique principale concernant Mars : faut-il tenter de la récupérer ou bien brûler l’Hérésie par exterminatus ? Nous savons tous que la seconde option n’aura pas lieu mais l’auteur se plaît à jouer sur les faits déjà pré-établis dans le fluff.
Notre héros sera donc renvoyé sur Mars afin de mettre la main sur un artéfact qui ne devra pas tomber entre les mains d’Horus : la Tabula Myriad, dépassant les compétences des cipher et autres logista, sa matrice combinera le calcul de macro-probabilité avec la créativité d’une abominable conscience, remplissant les manques dans ses données avec des théories repensées et imaginées. Ce n’est donc rien de moins qu’une boule de cristal prédisant l’avenir. L’histoire se voudra simple mais l’auteur usera du plein potentiel de la mission afin de vous offrir beaucoup d’action, un spectacle triple A.
Alors oui certains éléments se mettront en place de manière bien commode facilitant le déroulement d’une histoire ayant des bases simples, mais c’est vraiment l’action qui sera le cœur de Cybernetica, Rob écrivant des pages et des pages de scènes qui ne semblent jamais vraiment prendre fin. C’est cette singularité qui donnera la force à cette œuvre qui évite l’écueil pourtant facile. Car être un Tech-Marine sur la planète rouge, au moment où les flux de code des traîtres se répandent dans les cerveaux des serviteurs et autres abominations Martiennes, est une véritable épreuve. Ce n’est qu’à la toute fin que le calvaire s’arrêtera, d’ailleurs d’une manière assez inattendue.
L’auteur se plaira à jouer avec les attentes du lecteur du début à la fin de l’aventure. Après avoir vécu la fuite de Mars, quel esprit sain voudrait y retourner ? Pourtant notre héros le Carrion ira d’étape en étape pour sauver Mars et éviter un Exterminatus qui pourrait ralentir l’avancée technologique de l’Imperium et mettre entre les mains d’Horus un artéfact de choix.
Les plus
- Notre héros a de l'allure et de la classe.
- La Mars de Rob Sanders > la Mars de Graham McNeill.
- Des descriptions solides qui ne manqueront pas de plonger le lecteur dans davantage d'horreur.
- Un chapitre sur Terra qui fera un excellent break avant de repartir pour Mars.
- Diablement rythmé, ça ne s'arrête pas une seconde.
- Sans en travestir la forme, l'auteur illustre le Mechanicum avec une grande attention, tout en saupoudrant le tout de sa propre créativité.
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Les moins
- Une Mars qui a l'air petite en terme d'échelle, le Carrion parcourant de multiple lieux.
- L'histoire reste simple et ce n'est pas en polichant son oeuvre à l'excès que nous pourrons en oublier ce point.
- Certains éléments de l'histoires viendront s'enclencher bien convenablement, trop convenablement même.
- Amateur d'anglais, la lecture de Cybernetica n'est pas la plus accessible, principalement due à son vocabulaire très spécifique et à ses descriptions à rallonge.
Si un technoprêtre lisait Cybernetica, il suinterait probablement de l'huile. Cet novella est sans équivoque pour tous les fans du culte de Mars mais aussi pour tous les autres qui y trouveront un récit dynamique, orienté vers l'action et saupoudré de tonnes de références au Mechanicum.