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Avis sur La Galaxie en Flammes par Maestitia

Publié le Lundi 29 décembre 2025

La Galaxie en Flammes est le roman où l’Hérésie cesse d’être une menace abstraite pour devenir une réalité charnelle, sanglante, irréversible. Après la chute intime et métaphysique d’Horus sur Davin, Ben Counter hérite d’un matériau déjà incandescent : il doit transformer la trahison annoncée en acte fondateur. Et il le fait sans détour, parfois sans élégance, mais avec une brutalité qui correspond parfaitement à ce qu’il raconte. Ici, il n’est plus question de doutes philosophiques ou de faux équilibres politiques. Tout est déjà cassé. Le livre raconte l’instant précis où l’illusion de la Grande Croisade meurt, et où l’Imperium bascule dans une guerre fratricide dont il ne se relèvera jamais vraiment.

Dès les premiers chapitres, on sent que quelque chose a irrémédiablement changé chez les Sons of Horus. Les commémorateurs sont marginalisés, les artistes persécutés, la parole muselée. Loken, autrefois cœur moral de la Légion, est désormais isolé, presque suspect. En parallèle, la foi impériale gagne du terrain à travers Euphrati Keeler, désormais figure quasi mystique. Ce contraste est fondamental : pendant que l’idéologie officielle se durcit et se vide de sens, une croyance interdite commence à produire des miracles. Counter appuie là où ça fait mal : l’Imperium se prétend rationnel, mais c’est déjà un cadavre idéologique en train de nier sa propre décomposition.

Le conclave d’Horus avec Mortarion, Fulgrim et Angron est un moment clé. Sur le papier, quatre Légions pour écraser une rébellion, c’est absurde. Dans les faits, c’est déjà une mise en scène. Horus ne rassemble pas des alliés, il prépare un sacrifice. Loken et Tarik, exclus des décisions, comprennent confusément que quelque chose ne tourne pas rond, sans encore saisir l’ampleur de la trahison. Pendant ce temps, Garro et Tarvitz émergent comme des figures tragiques : des Astartes fidèles à l’Empereur, mais surtout fidèles à une idée de l’honneur que leurs Primarques ont déjà abandonnée.

Istvaan III est le cœur du roman, et Counter y va sans anesthésie. Le déploiement des quatre Légions, les massacres de civils, l’ivresse guerrière des World Eaters : tout annonce le désastre. Le bombardement viral reste l’un des moments les plus insoutenables de la saga. Pas parce qu’on ne le connaît pas, tout lecteur de l’Hérésie sait ce qui arrive, mais parce que Counter choisit de nous le faire vivre à hauteur d’homme. Les commémorateurs sont forcés d’assister à l’extermination en direct, avant d’être exécutés à leur tour. Horus ne se contente pas de trahir : il met en scène sa trahison. Il la regarde. Il la partage. À cet instant, il n’est déjà plus un Primarque : il est un tyran en devenir.

La suite du roman, centrée sur la résistance désespérée des loyalistes abandonnés sur Istvaan III, est une longue élégie funèbre. Tarvitz, Garro, Loken, Torgaddon : tous incarnent ce que l’Adeptus Astartes avait de meilleur avant sa corruption. Leur combat n’a aucune chance d’aboutir, et Counter ne cherche jamais à nous faire croire le contraire. Angron, lâché sur le terrain, achève ce que les bombes n’ont pas détruit. Il ne combat pas des ennemis : il abat des frères. La violence devient intime, presque obscène. C’est là que le roman est le plus fort : quand la guerre cesse d’être stratégique pour devenir personnelle.

Le dernier tiers, intitulé Frères, porte bien son nom. Les duels finaux : Loken contre Abaddon, Aximand contre Tarik, Tarvitz contre Lucius sont moins des affrontements martiaux que des ruptures symboliques. Lucius, déjà sur la pente qui le mènera à la monstruosité, trahit sans remords. Abaddon, encore prisonnier de son orgueil, ne comprend pas qu’il est en train de tuer l’idéal même qu’il prétend servir. Les morts qui s’enchaînent ne sont pas héroïques : elles sont nécessaires, presque administratives. La Galaxie en Flammes ne glorifie jamais la trahison. Elle la montre comme ce qu’elle est : une mutilation volontaire.

Sur le plan de l’écriture, Ben Counter n’a pas la finesse psychologique d’Abnett ni l’ampleur mythologique de McNeill, mais il possède une qualité essentielle pour ce tome précis : il sait quand accélérer. Le roman est tendu, parfois abrupt, parfois maladroit, mais rarement tiède. Certaines transitions sont brutales, certains personnages manquent de profondeur, mais l’impact émotionnel est là. On ne sort pas indemne d’Istvaan III. Et c’est exactement ce que ce livre devait faire : vous laisser un traumatisme tenace.

Les plus

  • La mise en scène implacable de la trahison d’Istvaan III.
  • Le traitement tragique et digne des loyalistes (Tarvitz, Garro, Loken, Torgaddon).
  • L’horreur du bombardement et des fratricides.
  • La transformation définitive d’Horus en tyran assumé.
  • Le contraste puissant entre foi émergente et idéologie impériale mourrante.

Les moins

  • Une écriture parfois sèche, moins nuancée que dans les tomes précédents.
  • Certains personnages secondaires sous-exploités.
  • Des transitions parfois abruptes dans le dernier tiers.
4.5/5

La Galaxie en Flammes est un roman nécessaire, brutal et profondément tragique. Il ne cherche pas à séduire : il acte. Istvaan III n’est pas seulement un massacre, c’est la mort symbolique de la fraternité Astartes. Ben Counter livre un texte imparfait mais essentiel, qui transforme l’Hérésie d’Horus en guerre ouverte, et condamne définitivement toute possibilité de retour en arrière. À partir d’ici, il n’y aura plus que des cendres.

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