Critique de Midnight on the Street of Knives par Maestitia
Publié le Samedi 7 juin 2014 | 16 révisions avant publication | 4 corrections après publicationMaître Bellathonis a toujours été gourmand de nouvelles. Il avait exigé de tous ses serviteurs l’importance de lui relayer la moindre bribe d’information, de spéculation, ainsi que tous les ragots et autres rumeurs qui pouvaient atteindre leurs serviles oreilles. Le maître avait même été jusqu’à mettre en évidence les modifications qu’il avait effectuées aux servants qui s’étaient révélés trop lents ou trop stupides pour se conformer à cette règle simple, mais essentielle.
Oui, maître Bellathonis prenait les nouvelles très au sérieux et maintenant c’est Xagor qui subissait l’infortune d’être le détenteur d’une information qui pouvait tout changer. Une Disjonction !
Sa main se resserra sur le haut de la jarre comme rêvant de l’étouffement de Matsilier pour lui avoir tout raconté en premier lieu. Ces vieilles sorcières avaient prédit une Disjonction avant la fin de l’année. L’imbécile avait été si fier de lui, qu’il n’avait pas pu attendre et avait partagé ce secret dont il ignorait l’importance. Cela aggravait les choses bien plus encore.
À qui d’autres avait-il bien pu tout raconter ? Combien de temps mettrait-il pour revenir chez son maître ? N’y était-il pas déjà ? Dans ce cas, Xagor, le plus fidèle et le plus dévoué des serviteurs du maître, se verrait excréter de tous les orifices, sauf ceux prévus à cet effet.
Minuit, dans le quartier des lames. Voilà une traduction que cette nouvelle pourrait porter. Avec les Eldars Noirs, rien n’est jamais limpide et sans danger, bien au contraire. Avec cette courte histoire, Andy Chambers va permettre au lecteur de tremper, pour la première fois, la main dans l’ambiance si particulière de Commorragh et de ses habitants plus vils les uns que les autres. En effet, Midnight on the Street of Knives est une introduction au premier tome sur la saga de ces sombres Eldars, La Voie du Renégat.
Est-ce qu’Andy saura capter notre attention pour nous donner envie de lire la suite ? Et bien oui, il y parviendra grâce à plusieurs procédés plutôt simples.
Xagor est l’esclave favori du maître des tortures Bellathonis et il est en possession d’une nouvelle inestimable pour lui, mais pas que. Bien qu’étant une simple gorgone (wrack), Xagor devra affronter les ruelles sombres et impitoyables de la basse Commorragh afin de délivrer son message si pesant pour ses frêles épaules. Pourquoi si lourd ? Car il s’agit ni plus ni moins de l’apparition imminente d’une Disjonction !
Pour celles et ceux qui n’auraient pas lu le premier tome de la saga, une Disjonction est une perturbation majeure qui menace l’intégrité de la toile en un certain point (en l’occurrence Commorragh) affaiblissant la barrière qui la protège du warp et de ses entités néfastes. Un tel cataclysme est souvent lié à la volonté des puissances de la ruine et bien que ce ne soit pas chose courante, ce n’est pas la première fois que la cité noire subit une Disjonction.
Avec une nouvelle aussi conséquente entre les mains d’un simple sous-fifre, le lecteur sentira d’entrée de jeu la pression, l’angoisse et le désespoir de Xagor. Être porteur de secret n’est jamais bon, d’autant plus lorsqu’il vous faut traverser le quartier des lames, lieu de rencontre où tous les infâmes pirates de la toile se vendent et s’échangent poignards monomoléculaires, poisons à retardement et autres drogues surpuissantes. À présent que vous avez le décor et l’enjeu, ajoutez à cela Kharbyr, un commorrite qui a été mandaté afin d’intercepter Xagor dans le but de lui planter une lame entre les omoplates sans autres formes de procès.
Et nous voilà parti pour une partie de chasse à la souris, façon oreilles pointues
Grâce à ses trois paramètres simplistes, l’auteur nous immergera dans un décor sombre et d’une dangerosité extrême. Vous vouliez du sang et de l’angoisse, vous voici exaucé.
Alors que Xagor tentera de ne pas prendre ses jambes à son cou, Kharbyr quant à lui se rapprochera de sa proie en se dissimulant parmi les ombres, progressant de ruelle en ruelle. La nouvelle est rapide à lire et l’action qui y sera insufflée ne sera pas à la hauteur pour la simple et bonne raison qu’elle ne sera pas suffisamment pertinente. Cette traque, bien que très bien décrite, s’essoufflera vers la fin, nous laissant aisément deviner sa conclusion même si un beau twist nous sera servi.
Chose surprenante, bien que l’on ne suive véritablement que deux personnages, les transitions entre le traqueur et le traqué sont bien trop brusques ! On sautera souvent de Xagor à Kharbyr et inversement sans indice littéraire. Pour un novice, faire la différence entre une gorgone et un kabalite n’est pas facile et ces sauts entre les protagonistes sont loin d’arranger l’affaire.
Mais le gros point fort de cette nouvelle reste bel et bien son immersion. Une belle et sombre plongée dans les rues de Commorragh après le couvre-feu est une parfaire mise en situation, que ce soit pour les personnages comme pour le lecteur. Au-delà de l’intrigue principale, l’auteur nous permet de visiter véritablement la basse Commorragh.
En détaillant les ruelles, l’architecture, l’ambiance de ses quartiers, Andy Chambers nous offre une visite guidée des plus savoureuses, nous permettant de profiter d’un décor jamais (ou très rarement) exploité jusqu’à présent.
Les plus
- Une ambiance pesante.
- Un rythme soutenu.
- Une atmosphère Commorrienne respectée.
- Un sympathique retournement final.
Les moins
- Trop de jonglages soudains entre les deux personnages.
Superbe introduction à la Disjonction et plus exactement à la trilogie sur les Eldars Noirs d'Andy Chambers. On retrouve bien le cocktail ravageur de cette race décadente qui représentent la peur, la souffrance et l’inattendu.