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Critique de The Keeler Image par Priad

Publié le Dimanche 9 octobre 2016 | 8 révisions avant publication | 2 corrections après publication

Une demie heure avant le commencement de la vente, j’avais été appelé pour rencontrer Medonae.
Il se trouvait dans une chambre privée. Il me sourit et me salua depuis la porte avant de me faire entrer.
Medonae le Mangeur avait cessé d’être un être humain depuis des années déjà. Son appétit l’avait transformé. Sa carrure blême n’était qu’une pyramide de chair pesant plus de neuf tonnes supportées par une armature en suspension. Ses membres étaient devenus indiscernables. Des groupes d’esclaves travaillaient sans fin à le masser à l’aide d’huile afin de pénétrer les pores de sa peau et la rendre plus souple, alors que des serviteurs en file indienne se succédaient en procession pour lui apporter de la nourriture, dispensée elle-même par un drone en lévitation.
Il était difficile de discerner son visage, juste un point au milieu de cette montagne de graisse.
 — Mon cher Eisenhorn, dit-il. Je désirais avoir un mot avec vous car j’ai le sentiment que cette journée ne va pas bien se terminer. Je veux votre assurance que vous n’intenterez rien contre moi.
 — Vous avez simplement mis en place une enchère Medonae, lui répondis-je, j’ignore bien qu’elle loi cela peut enfreindre ?
 — Votre assurance, s’il vous plaît, répéta-t-il.
 — Vous l’avez. Mais puis-je me permettre de préciser Medonae que si vous sentiez que cette enchère allait mal se terminer, vous n’auriez probablement pas dû l’orchestrer.

La Garde Impériale a son audience et après maints compliments, j’ai fini moi-même par démarrer la lecture des aventures du Commissaire Gaunt. Cependant l’Inquisition aura toujours une place spéciale dans mon cœur de lecteur SF. Les romans sur l’Inquisition ont à mon sens cette parfaite balance entre enquêtes, action et originalité. Chaque roman jusqu’à présent n’a fait que confirmer la force de cet univers à me faire voyager de planète en planète, décrivant des citées ruches où la moindre ruelle peut s’avérer être un coupe-gorge sans issue.

La trilogie d’Eisenhorn reste un classique sans égal, un voyage pour notre Inquisiteur mais aussi pour son équipe, toujours fidèle au poste. Peu d’auteurs peuvent se targuer d’avoir écrit une enquête s’étendant sur plusieurs décennies en gardant une cohérence de tous les instants (encore que le dernier tome reste le plus bancal). J’ai en tête la série Fondation écrite par Isaac Asimov qui reste pour beaucoup le père fondateur de la Science Fiction. À l’époque déjà l’auteur d’origine russe avait cette capacité à emboiter les pièces d’un énorme puzzle ensemble, et avec une aisance déconcertante alors que la série s’étendait toujours plus. Lire un récit de Dan Abnett, c’est savoir qu’aucun détail n’a été laissé au hasard et que l’auteur se plaira en plus à prendre des risques pour surprendre et divertir.

La surprise commença pour moi lorsque je vis que l’auteur venait de sortir une nouvelle histoire sur Eisenhorn. Bien que la série se termina il y a plus de 10 ans, l’auteur poursuivit les aventures de ce dernier au travers de quelques nouvelles pendant les années qui suivirent, avant de laisser la place au jeune (Ravenor). Néanmoins ce n’est qu’à l’issue de cette seconde trilogie sur l’élève d’Eisenhorn que se profilait une clôture pour la série. À ce jour cet ending reste à écrire et le premier tome Paria de la dernière trilogie impliquant à la fois Eisenhorn et Ravenor, reste sans suite. J’avais commencé à perdre tout espoir de revoir un jour Eisenhorn dans sa tenu d’Inquisiteur mais il semble que Dan Abnett n’ai pas oublié ses amours de jeunesse.

Avec The Keeler Image, nous avons certes droit à une énième nouvelle sur notre Inquisiteur (Renégat), mais nous aurons surtout la chance de voir la série liée artificiellement avec l’Hérésie d’Horus. Se situant entre le tome Malleus et Hereticus, cette nouvelle  d’une vingtaine de pages mènera notre héros sur Pallik, un monde au climat imprévisible où il peut faire nuit des jours entiers avant de laisser la place à trois soleils illuminant la même face de la planète. Avouez qu’en ce qui concerne la rudesse du lieu de l’action, on pourra difficilement faire pire (sauf peut-être pour ceux ayant déjà mis les pieds sur Pandorax). C’est avec pour objectif de participer à une enchère mettant en vente un artéfact datant du temps de l’Hérésie qu’Eisenhorn viendra visiter ce monde brûlé par la guerre.

Je cru en premier lieu que ledit objet n’allait être révélé qu’à la toute fin, tel un twist inattendu, mais ce fut dès les premières pages que je fus conscient de la nature de l’objet. Il vous suffira de lire le titre pour réaliser que ce que l’Inquisiteur est venu voir de plus près n’est autre qu’une image prise par Euphrati Keeler durant l’Hérésie, une image d’Horus en personne. Dernier vestige d’un temps ancien, où le lectio divinitatus s’appuyer sur la croyance que l’Empereur était un Dieu, cette photo aura de quoi attirer acquéreurs de toute part. Eisenhorn déjà renégat à ce moment de l’histoire ne viendra pas sous couvert d’une mission officielle mais plutôt utilisera cette opportunité pour tenter de voir qui mettra la main sur un objet d’une telle rareté. Il est dit d’ailleurs que le l’acquéreur de cette photo, et uniquement ce dernier pourra aussi parcourir les documents écrits par la main d’Euphrati Keeler accompagnant le cliché. Des documents qui raconteraient comment cette photo a été prise et donneraient des informations supplémentaires sur ses circonstances.

La nouvelle se plaira à nous interroger subtilement sur la date de ce cliché, impliquant que la photo ait été prise bien après la mort d’Horus, comme pour annoncer son retour. C’est avec ce genre de détails que Dan Abnett donnera vie à son récit, en attirant notre curiosité sur des points qui reste à élucider. Bien évidemment le mystère restera entier car le but de l’auteur n’est pas de dénaturer l’histoire, mais bien de lui donner forme et détails afin que nous puissions apprécier la gravité de la situation.

Bien que l’action viendra un peu dynamiser cette nouvelle de moins de vingt pages, le dernier quart de l’histoire semblera très expéditif, comme si l’auteur avait atteint son quota de mots et ce devait de mettre fin au récit. Il est vrai que l’histoire aurait mérité d’être plus longue et que la fuite de notre héros soit par exemple décrite, pourquoi pas en référençant un lieu d’action du tome 3 afin de lier davantage l’œuvre dans la série. Sans écrire de véritable épilogue, Dan Abnett terminera donc plutôt abruptement cette nouvelle, même si la punchline finale montrera qu’il n’a rien perdu de sa maitrise.

Si vous ne désirez pas vous spoiler, je vous invite à ignorer ce paragraphe dans lequel je lève le voile sur les rebondissements de The Keeler Image.

L’histoire restera donc dans la veine de ce que nous connaissons avec les récits sur l’Inquisition et c’est bien les petits détails et connexions entre les personnages qui feront briller cette nouvelle. Vous vous rappelez que la planète peut parfois avoir jusqu’à trois soleils à la fois dans le même ciel ?
Et bien l’auteur n’aura pas donné ce détail par hasard car alors que le temps vacillera violemment, notre héros verra l’image de Keeler bruler sous la température mortelle qui s’abattra sur le voleur ayant fui avec l’image.
Eisenhorn sera pris dans un double jeu, à la fois avec la présence de la Cognitae mais aussi avec les ordos ayant mis en place cette enchère de toutes pièces pour pouvoir lui mettre la main dessus. On appréciera réellement voire les pièces  du puzzle s’enclencher, même si le tout se terminera brutalement sur un appel vox pour demander une extraction, alors que Cherubael sera lâché pour faire le ménage.

Dan Abnett a toujours été animé par l’usage de ces artéfacts étranges qui lors de l’écriture d’une histoire, peuvent renverser la donne, et même si ce mécanisme narratif paraît simplet, il est toujours utilisé avec justesse et raison. Dans Paria, c’était le nom même de l’Empereur qui était abordé en tant qu’artéfact et bien qu’ici ce dernier ait une utilité toute relative à l’histoire, Dan est le seul à faire réfléchir sur leur possible existence, ainsi que sur la puissance qu’un tel objet pourrait avoir.

Avec une publication si inattendue, je ne peux que remercier l’initiative car retourner au côté d’Eisenhorn se fit sans heurts et avec une certaine nostalgie non dissimulée. Espérons que nous n’ayons pas à attendre encore plusieurs années avant d’avoir cette opportunité à nouveau.

Les plus

  • Eisenhorn revient après tant d'années, quelle nostalgie.
  • Le style n'a pas changé, simple et efficace, parfaitement balancé.
  • L'histoire s'emboite bien dans la trame globale de la série.
  • Une image d'Horus en personne prise par la Sainte Euphrati Keeler, il fallait oser.
  • Un récit vivant plein de détails.

Les moins

  • Une fin abrupte.
  • Une équipe Inquisitoriale très succincte, mais où sont passés tous nos héros ?
4.5/5

The Keeler Image est une nouvelle que nous n'attentions pas mais qui ravira les fans de la première heure. Cependant elle aura un intérêt très limité pour les hérétiques fuyant comme la peste le contenu sur l'Inquisition. À vous de choisir, pour ma part Eisenhorn aura toujours mon aveugle fidélité quitte à attirer le courroux des ordos.